La boîte à outils du Personal Branding

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Le blog EVE vous conseille. Avec l’aide d’expert-es qui acceptent de livrer leurs “secrets”, nous vous proposons régulièrement des boîtes à outils pour aborder en plus grande confiance les dimensions multiples de la vie professionnelle.

 

En cette période de rentrée, focus sur le Personal Branding, avec les éclairages de Pascale Baumeister, coach et consultante, auteure de l’ouvrage Révéler sa véritable personnalité avec le Personal Branding. 

 

 

C’est quoi le Personal Branding?  

La formule est construite sur une métaphore marketing : le « branding », dans le petit lexique du chef de produit, c’est la gestion de marque. Avec un double volet : identité (à définir et construire) et image (à faire connaître et rayonner).

 

Toutes et tous des « produits »?

Mais alors, en l’appliquant aux personnes, sommes-nous en train de nous considérer, nous humain-es, comme des produits qui se chercheraient un bon packaging et une séduisante étiquette ?

Il ne faut pas filer abusivement la métaphore, répond Pascale Baumeister, « il s’agit de prendre acte du fait qu’on est sur un marché, le marché du travail. Où il y a effectivement de la concurrence et le besoin de se valoriser et de se différencier. Mais sur ce marché un peu particulier quand même, c’est l’inverse du formatage qui fait la valeur, et cela de plus en plus aujourd’hui que les modèles classiques d’organisation fondés sur la légitimité de la fonction reculent pour faire plus de place au leadership des individus. Les recruteurs recherchent des personnalités qui vont faire la différence, au sens propre du terme. Et c’est cela qui nous oblige à nous poser la question de qui nous sommes, en tant qu’individus singuliers, et de comment nous allons mettre en avant cette singularité. »

 

Un « marché » du travail plus complexe qu’un autre marché, plus complexe aussi qu’il n’a jamais été

Donc, le marché du travail s’est complexifié pour tous ses acteurs, ceux qui recrutent comme ceux qui postulent… Le boulot, ça se trouve de plus en plus par le réseau, en partie sur la foi de recommandation et de la réputation, et ça se décroche sur d’autres critères que les seuls diplômes ou « expériences dans un poste similaire ».

Ce que l’on cherche, c’est du potentiel, du talent, de la présence, du style, du charisme, de l’influence, du leadership… Autant de choses qui relèvent pour large partie de la posture et de la personnalité de l’individu. Et c’est précisément cela que le Personal Branding travaille à identifier, valoriser et mettre efficacement en avant.

 

 

Ca a commencé quand le Personal Branding? 

De Marilyn à Mitterrand, la valeur ajoutée de l’incarnation

Ce mouvement de re-personnalisation, d’aucun-es l’ont vu venir dès le début des années 1980. Un « Jacques Séguéla, parlait déjà de Personal Branding, sans le nommer, dans son essai Hollywood lave plus blanc », estime Pascale Baumeister.

L’inventeur de la marque-personne, dont la célèbre campagne Afflelou est un modèle du genre, avait aussi « eu l’intuition de la personne-marque, en s’inspirant de la façon dont Hollywood ne se contentait pas de produire des films mais produisait aussi des stars. Marilyn Monroe n’est pas seulement l’incarnation ponctuelle d’un personnage dans tel ou tel long-métrage, elle est aussi un personnage à part entière, en tant qu’individu, et son aura personnelle apporte un surcroît de valeur à tout film dans lequel elle apparait, voire à toute l’industrie du cinéma américain. La première application, franchement audacieuse, que Séguéla fit de cette leçon, ce fut la campagne « La force tranquille », pour Mitterrand. Il a littéralement capitalisé sur la personnalité du candidat et construit tout un imaginaire autour de ça, pour susciter le désir collectif de lui faire confiance. »

 

De la comm’ appliquée au management à la définition d’une nouvelle discipline du développement personnel

En cette même année 1981, de l’autre côté de l’Atlantique, Al Ries et Jack Trout forgent discrètement le terme de Personal Branding, dans leur ouvrage intitulé Positioning : the battle for your mind, très limpidement sous-titré « How to be seen and heard on the oovercrowded marketplace. » La notion passe plus ou moins inaperçue : on lit Positioning comme une leçon de comm’ appliquée au management, sans bien cerner que la révolution de « l’être soi » au travail a commencé.

Ce qui est compris, c’est que le « faire savoir » est une compétence clé, sans qu’elle soit encore pleinement articulée au « savoir être ».

 

Tom Peters, l’inventeur de « l’entreprise libérée » y revient dans un article de 1997, titré « The brand called you« . Cette fois-ci le message est sans ambages : « It is simple, you are a brand. You are in charge of your brand.« , et de commettre dans la foulée un ouvrage sur le sujet (Brand You 50) qui affirme entre autres que chacun-e est « le CEO de sa vie » et « l’ambassadeur de ses projets« .

Cette fois-ci, on entend, à tout le moins dans le cercle resserré des expert-es et consultant-es en management, que l’individu n’est pas seulement créateur de valeur mais aussi « porteur » de valeur. Et que c’est ce qu’il est dans ce qu’il fait qui différencie son projet de celui d’un autre. Ceci expliquant pourquoi une même idée pourra faire un déprimant flop ou bien un retentissant succès, selon qui l’endosse. A bon entendeur salut : si tu veux que l’on croit en tes projets, il faut que l’on croit aussi en toi!

 

Le succès populaire du concept de Personal Branding arrive au début des années 2000 avec Peter Montoya, qui écrit « la bible en deux tomes de tout ce qu’il y a à savoir et à faire pour se mettre en valeur dans le travail, jusqu’à la façon d’écrire son titre et de mettre en page sa carte de visite« , décrit Pascale Baumeister.

Après lui, « William Arruda, qu’on appelle aujourd’hui le « gourou » du Personal Branding va le penser en démarche complète de développement personnel,avec une méthode intégrant toute une réflexion sur la connaissance de soi en amont de la stratégie de communication sur soi. »

 

 

Se connaître pour se faire reconnaître

 

A compter du moment où le Personal Branding entre dans le champ du développement personnel, « se connaître est aussi important que se faire reconnaître« , explique Pascale Baumeister.

 

Non, le « faire savoir » n’est pas l’apanage du hâbleur qui tire la couverture à soi!

Distance est donc prise avec la posture (assez irritante et pas forcément enviable, quoique franchement caricaturale) du hâbleur tout creux à l’intérieur qui se survend éhontément et ramène incessamment tout (et surtout la couverture) à soi!

 

« Qui suis-je? », la question la plus importante, mais aussi la plus compliquée qui soit

Au lieu de ça, on se confronte à une question quasi-shakespearienne : Qui suis-je?

« Fut un temps où l’on se définissait par son appartenance à une famille. On était le fils/la fille de quelqu’un – et, pour les femmes, l’épouse de quelqu’un. Ensuite, on a pu a se définir par un métier, que l’on avait appris dans sa jeunesse et que l’on allait exercer toute sa vie, souvent dans la même entreprise, d’ailleurs. A présent que les parcours personnels et professionnels se conçoivent et se construisent de façon radicalement différente, beaucoup moins linéaire et parfois moins immédiatement lisible (ne serait-ce que parce que les noms de métier actuels, par exemple, ne parlent plus d’eux-mêmes, il faut de plus en plus souvent expliquer ce que signifie le titre inscrit sur sa carte de visite), la question « comment se présenter » n’a plus de réponse toute faite. »

« Chacun-e va tous être obligé-e d’y réfléchir et de mettre en place des éléments de langage pour se raconter. » analyse Pascale Baumeister.

 

 

Attendez-vous à être googlisé-e !

 

Diversité des moyens de communication et meilleure prise en compte de la diversité des individus : le « cocktail » des nouvelles formes de la visibilité

Ajoutons à cela deux phénomènes neufs: d’une part la prise en considération croissante de la diversité en chacun-e (on ne veut plus se définir seulement par son job, mais exprimer aussi ses engagements, sa vision, ses passions, ses talents multiples.

Et ça intéresse aujourd’hui les recruteurs autant que le diplôme ou le dernier poste occupé) ; d’autre part, la multiplication des moyens de communication à la portée de chacun-e. « Quand on dit Personal Branding, le premier mot qui vient à l’esprit aujourd’hui, c’est profil LinkedIn. C’est effectivement le minimum, même si ce n’est pas tout. Mais ça dit bien que la présence sur le web est devenue incontournable. Attendez-vous, bien sûr, à être googlisé-e par les recruteurs« .

 

Des outils de communication à la portée de toutes et tous, mais pas si simples à manier

En conséquence de quoi, « maîtriser son image et construire sa réputation sur le web fait aujourd’hui pleinement partie du développement professionnel« .

Sur ce terrain, nous avons quelques bonnes intuitions mais peut-être pas encore complètement  intégré toutes les subtilités de la réputation on-line ni exploré le vaste champ des possibles. Nous savons à peu près différencier les usages selon les plateformes : Facebook pour la famille et les potes, LinkedIn pour le boulot, en gros. Mais ce n’est, dans la réalité, pas forcément si tranché, à une époque de porosité accrue entre les espaces d’existence… Nous avons compris qu’on peut régler les paramètres de confidentialité sur les réseaux, même si on maîtrise plus ou moins bien cet aspect des choses et faute de formation solide sur le sujet, on en est souvent rendu à « bidouiller ».

 

En résumé, nous avons des outils de communication plus accessibles que jamais… Mais qui sont bien plus complexes à manier que les moyens traditionnels de la visibilité, qui de par leur coût, étaient de toute façon plutôt destinés aux institutions qu’aux personnes, et manoeuvrés par des pros de la comm’ et non par les quidam que nous sommes.

 

Pour préserver sa réputation, fuir les espaces de visibilité? 

Face à cela, il y a ceux qui se forment (c’est plutôt une bonne idée!) et il y a quelques irréductibles qui travaillent surtout à apparaître le moins possible, voire carrément pas du tout, sur la toile.

« Ce peut être une stratégie sophistiquée de se faire discret sur la toile, notamment quand on jouit d’une très forte réputation par ailleurs et qu’on est très demandé. Mais la plupart d’entre nous ne doivent pas s’attendre à ce qu’on vienne les chercher. »

« Alors, si vous fuyez le web par attitude défensive, par peur des réseaux sociaux en particulier, ça va poser un vrai problème. D’abord, parce que vous vous invisibilisez, ce qui n’est pas votre intention mais une conséquence subie de la crainte de ne pas être visible comme vous le souhaiteriez : vous allez préférer disparaître plutôt qu’apparaître d’une façon qui ne vous convient pas. C’est de toute façon un peu vain, car même en vous gardant d’intervenir vous-même sur le web, il se peut que vous y soyez malgré tout présent, cité et montré par d’autres, et pas forcément de la façon que vous voudriez non plus. »

Alors, on n’a pas le choix, le web, il faut y être un point, c’est tout et la seule question qui se pose, au fond, c’est comment y être avec pertinence et cohérence?

 

 

Il n’y a pas que LinkedIn dans le Personal Branding!

Il est incontestablement difficile de faire sans le web, aujourd’hui, et d’en connaître et maîtriser les codes et usages (« On ne rédige pas sa page LinkedIn exactement comme son CV papier« , par exemple).

 

L’e-réputation, ce n’est pas que les réseaux sociaux… 

Mais d’une, « le web ne se résume pas aux réseaux sociaux« , souligne l’experte : n’oublions pas les blogs (allez donc d’ailleurs jeter un oeil au blog de Pascale Baumeister), les médias participatifs, Wikipedia et on en passe, pour assurer sa présence sur la toile et faire connaître ses projets, ses accomplissements, ses domaines d’expertise, ses points de vue et tout le vaste champ de ses qualités (une bonne plume, une tournure d’esprit futée, un bon sens de l’humour, un joli bagage culturel…)

 

… Et l’influence on-line doit aussi se traduire « in real life » !

De deux, « le web n’est pas complètement séparé de ce qu’on appelle la vie réelle. Un réseau professionnel va prendre de la valeur quand vous allez échanger, en ligne, mais aussi et surtout en rencontrant physiquement les personnes. Autre exemple, un blog va pouvoir, comme la publication d’un article dans un journal traditionnel ou d’un ouvrage chez un éditeur, vous positionner en expert-e qui sera éventuellement invité-e à intervenir dans des conférences ou dans les médias classiques. » 

« C’est d’ailleurs, à ce moment, quand la présence virtuelle rejoint la présence physique, que va se révéler la cohérence entre ce que vous montrez de vous et ce que vous êtes. »

 

Une image de soi ambitieuse mais aussi « confortable » et cohérente avec son être profond

« Il faut que votre image vous soit confortable, que vous soyez vraiment bien dedans, qu’elle soit alignée avec votre être véritable. D’où l’importance, au risque d’insister, de faire un vrai travail de réflexion sur soi en même temps que le travail de communication sur soi. »

 

Ce qu’il faut donc bien comprendre de la démarche Personal Branding, c’est qu’elle considère l’être et son image comme un tout. Un tout diversifié et complexe qui va trouver à s’exprimer lors d’opportunités multiples et avec une grande variété d’outils, parmi lesquels il faudra choisir ceux qui nous conviennent le mieux, le tout en créant de la cohérence. Vaste programme!

 

 

Construire et mettre en oeuvre sa stratégie de « marque personnelle »

Alors concrètement, comment s’y prendre pour construire et mettre en oeuvre sa stratégie de « marque personnelle »?

Méthodologiquement et professionnellement, en appliquant quelques techniques simples de marketing et communication.

 

Mon offre : qui je suis? quel est mon projet? 

La construction de l’offre, pour commencer : « On se pose deux questions clés : « quel est mon projet » et « qui je suis ». Le projet, c’est ce que l’on veut faire. Il faut savoir repartir de l’envie, de ce que l’on a, soi, à proposer, sans chercher à se conformer à ce que l’on imagine que les autres veulent que l’on apporte. Quand on bâtit son projet, il faut vraiment tenir son cap, quitte à être un peu sourd, au moins dans un premier temps, à tous ceux qui objectent que ceci n’est pas possible ou cela sera trop difficile. »

 

« Puis on définit qui on est et ce que l’on a à mettre en avant : on est en partie les compétences que l’on a acquises, et il faut bien sûr, sur le marché du travail, faire valoir ses savoir-faire ; mais il ne faut pas oublier le reste de ses atouts et forces. On est une personnalité, qui a une approche des choses, un style, des façons d’être, de faire, d’interagir… Cela, on a parfois tendance à oublier de le mettre en valeur, voire à chercher à l’effacer, avec l’idée plus ou moins consciente que la personnalité doit se mettre en arrière-plan de la fonction. Mais la fonction, il va falloir bien l’habiter et l’incarner, avec sa signature unique. Il est vain de vouloir réprimer ou cacher des traits de sa personnalité que l’on considère comme des défauts. En Personal Branding, on va beaucoup travailler sur l’acceptation d’abord, puis la valorisation ensuite, d’éléments de la personnalité avec lesquels, pour une raison x ou y, l’individu est mal à l’aise, voire qu’il considère comme des « vices cachés ». En cela, c’est aussi un vrai travail de renforcement de l’estime de soi et de la confiance en soi. »

 

La demande : où je mets les pieds et à qui je vais parler?

Vient ensuite, l’étude du marché, qui vise à « comprendre l’environnement pour pouvoir s’y rendre visible et audible afin de mettre efficacement en avant son être-soi et porter son projet. »

C’est parti : définition des cibles (Dans quel environnement met-on les pieds? A qui va-t-on parler? Quels sont les « moeurs » de ses interlocuteurs?), des besoins (Quelles sont les attentes des recruteurs?, Quelles sont les « tendances » qui s’expriment dans le secteur?) et de la concurrence (Qui sont ceux qui ont fait leur place sur le marché que l’on vise? Comment se présentent-ils? Quelles voies ont-il empruntées pour se faire connaître et reconnaître?) etc.

 

Le plan de comm’ : ma stratégie, mes messages, mes relais

Une fois que l’on sait qui l’on est, ce que l’on veut et où on va, il n’y a plus qu’à… Bâtir une stratégie pour atteindre ses objectifs.

« Il faut pour cela considérer que l’on est ce que l’on va devenir, c’est à dire se projeter dans son ambition. Et l’affirmer. C’est comme ça que l’on se positionne clairement, vis à vis de soi et vis des autres. Souvenez-vous du candidat Hollande martelant dans un débat la formule « Moi, Président… ». Il n’est pas encore élu, mais il exprime avec force sa détermination à l’être. Il montre qu’il entre dans le costume et qu’il est en capacité de prendre le rôle« , analyse celle qui fut aussi costumière de cinéma et de théâtre avant de devenir coach et experte en Personal Branding.

 

Le tout premier des messages, c’est donc celui-ci : j’ai confiance en moi pour vous inspirer confiance.

On va ensuite diffuser tout un faisceau d’éléments qui confortent et renforcent la visibilité, la crédibilité et la légitimité : « On va soi-même prendre la parole sur soi, sur ses projets, ses points de vue, en se présentant comme une personne pertinente dans son champ, qui a des choses intéressantes à proposer. On va aussi travailler à ce que le message soit relayé par d’autres : c’est ce qui se passe, dans un réseau professionnel, quand vous êtes recommandé ; c’est aussi ce qui se produit quand vous écrivez un article et qu’il est largement repris sur les médias sociaux et éventuellement par les médias traditionnels. »

 

« Agir pour se rendre visible, plus encore que parler de soi, c’est réussir à faire parler de soi, en acquérant une réputation qui soit à la fois juste, c’est à dire méritée et alignée avec ce que l’on est, et positive, c’est à dire inspirante pour les autres. »

 

 

 

Marie Donzel, pour le blog EVE.

Remerciements à Béatrice Toulon.