Rencontre m-Women : agir pour réduire le « connectivity gap » en Afrique

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Rencontre avec Anne MacLaren, Directrice Dialogues Parties Prenantes à la Responsabilité Sociale d’Entreprise d’Orange.

 

 

 

Dans le cadre du programme m-Women, Orange donne aujourd’hui un grand événement sur le thème « femmes connectées en Afrique ».

Pour en savoir plus, nous avons interrogé l’une des organisatrices de la rencontre : Anne MacLaren, Directrice Dialogues Parties Prenantes à la Responsabilité Sociale d’Entreprise d’Orange.

 

 

Eve le blog : Bonjour Anne. Qu’est-ce que le Programme m-Women?

Anne MacLaren : Le programme m-Women fait partie des 4 priorités RSE pour Orange sur la zone AMEA, avec le m-agri (les services mobiles pour l’agriculture), la e-santé, et l’entrepreneuriat. Nous souhaitons que le numérique soit un moteur de progrès pour toutes et tous. Or les femmes africaines sont aujourd’hui moins connectées que les hommes. Il faut donc identifier et proposer aux femmes africaines les services essentiels pour leur quotidien, dans une logique de croissance durable.

 

 

Eve le blog : Quel est l’objet de cette rencontre « femmes connectées en Afrique » qui se tient aujourd’hui au siège d’Orange?

Anne MacLaren : Notre événement, auquel sont invité-es les collaborateurs et collaboratrices de l’entreprise de tous métiers, les responsables de la Fondation Orange, des responsables RSE de filiales partout dans le monde, des entreprises partenaires, des membres d’ONG, vise à faire passer l’information sur l’utilisation des TICs par les femmes en Afrique, à faciliter le partage des bonnes idées et bonnes pratiques, et à encourager les actions qui ont un double impact : sur notre business, et pour faire progresser la situation des femmes en Afrique.

 

 

Eve le blog : Vous allez notamment présenter les résultats de la grande étude « Connected Women » de GSMA. Quels en sont les grands enseignements?

Anne MacLaren : Le premier enseignement de l’étude Connected Women, c’est qu’il y a un vrai gap de pénétration du digital (de l’ordre de 14%) entre femmes et hommes dans le monde en développement. 1,7 milliards de femmes du monde en développement ne possèdent pas de mobiles… Alors que 60% de celles qui sont équipées affirment que le mobile les aide à développer leur autonomie et leur business.

 

 

Eve le blog : Qu’est-ce qui fait frein à l’accès aux TICs pour les femmes du monde en développement ?

Anne MacLaren : 5 freins sont identifiés par l’étude. Le premier, c’est le coût de l’équipement, des communications et de l’électricité. Le second frein, c’est la qualité et la couverture du réseau (en zone rurale notamment). Le troisième, c’est la sécurité : elles ont peur d’être harcelées au téléphone. Et cette peur n’est pas un fantasme : dans les pays où le harcèlement des femmes est monnaie courante, où se pratique parfois même la vente de base de données de femmes, avoir un numéro de téléphone, c’est risquer d’être assaillie de coups de fil non désirés, alors beaucoup préfèrent encore se priver d’un outil pourtant indispensable pour leur propre développement. Le 4è frein, c’est un défaut de confiance dans les opérateurs. Le 5è, c’est le sentiment de ne pas être à l’aise avec la technologie. C’est un thème sur lequel travaille activement la Fondation Orange, en France et dans le monde, avec ses « Maisons Digitales » qui offrent aux femmes des « ateliers numériques » pour se former aux TICs.

 

 

Eve le blog : Vous avez aussi fait plancher des étudiant-es sur le thème des services utiles qu’un opérateur de télécom pourrait apporter à des femmes africaines…

Anne MacLaren : C’est l’école Novancia qui a proposé ce challenge étudiant à Orange. Le brief, c’était d’imaginer un service pour l’empowerment des femmes d’Afrique, qui ait un double impact économique et social. Ils et elles ont été une centaine à participer et leurs projets nous ont épaté-es. Ils et elles se sont passionné-es pour le sujet, ont mené de vrais travaux de recherche pour comprendre les contxtes et faire des propositions pertinentes. L’équipe gagnante a conçu un service Orange Money pour simplifier et sécuriser les transactions des tontines (les tontines, ce sont des collectifs qui mettent en commun leur épargne pour financer le projet d’un individu. Et ensuite, on recommence, ce qui permet à chacun-e de bénéficier à son tour du soutien de la communauté). Ce projet nous a paru très porteur car il révèle une vraie connaissance des pratiques locales et parce qu’en plus de répondre à des besoins immédiats, il prend en compte un enjeu fondamental pour l’autonomisation des femmes dans le monde en développement : le passage de l’économie informelle à l’économie formelle, grâce au mobile banking.

 

 

Eve le blog : Pour finir, vous présenterez la démarche « dialogues parties prenantes » d’Orange au Niger et au Sénégal. Quelle est cette démarche et quels sont ces apports?

Anne MacLaren : La démarche consiste à aller à la rencontre directe des actrices et des acteurs de terrain, pour recueillir une information qualitative la plus fine qui soit sur les contextes et sur les attentes, mais aussi sur les mécanismes d’influence et les circuits de décision (qui ne sont pas toujours les circuits formels). Nous avons rencontré des interlocuteurs dans les ministères, des responsables d’ONG, des distributeurs, des medecins, étudiant-es, le sultan de Maradi au Niger… Aucune étude externalisée ne peut restituer cet écho des signaux faibles, cette vision précise des détails dans lesquels parfois tout se joue. Nous avons mené plus de 70 entretiens en zone urbaine et rurale au Niger et au Sénégal, avec les équipes locales. Il en est ressorti que les besoins premiers exprimées par les femmes de ces pays sont ceux qui se rapportent à la santé et à la sécurité (les services d’information et de prévention santé, les services de blocage des appels malveillants, les fils d’urgence en cas de violences)… Tout de suite après cela, elles sont en demande de support à l’entrepreneuriat, avec notamment des centres de formation numérique.

 

 

Eve le blog : Ce « dialogue parties prenantes » est-il voué à déboucher sur de nouvelles actions dans les filiales du groupe?

Anne MacLaren : Oui, c’est bien le but. Et ça a déjà commencé à produire ses effets : notre filiale Sonatel au Sénégal a créé un Prix de l’EntrepreneurE SocialE de La Femme Sénégalaise et développe actuellement une offre spécifique pour faciliter la vente de produits de transformation par les femmes. D’autres projets sont en germe, dans les filiales africaines du Groupe. Par ailleurs, ce dialogue parties prenantes a aussi été en soi une occasion de s’affirmer pour certaines femmes : je pense notamment à la responsable de la plus grande boutique Orange de Niamey, qui a saisi l’occasion de ce dialogue pour s’investir à fond sur la question du « social business » au Niger, et qui est devenue depuis la directrice RSE pour ce pays.

 

 

 

 

 

 

Propos recueillis par Marie Donzel, pour le blog EVE.

 

 

 

 

 

Lire aussi : 

– Notre interview d’Elodie Neil, directrice « Direct To Consumer » de Danone (également en anglais)

– Notre rencontre avec Miora Ranaivoarinosy, Social Innovation & Community Manager de danone.communities

– Notre entretien avec Corinne Bazina, Directrice Générale de danone.communities

– Notre portrait de Bouchra Aliouat, Secrétaire Générale de la Fondation KPMG (également en anglais)

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