Egalité & leadership équilibré : 6 actus à retenir de mars 2016

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La revue de web du blog EVE

Le blog EVE suit quotidiennement l’actualité des initiatives et des débat sur l’égalité professionnelle et le leadership équilibré.

Chaque fin de mois, il vous propose sa sélection commentée d’actus marquantes dans sa revue de web.

L’appel du mois : Ban Ki-moon veut des gouvernements et parlements mixtes partout dans le monde

L’Union interparlementaire faisait paraître en début de mois son rapport annuel sur la place des femmes dans les assemblées représentatives.

Ses conclusions sont plutôt décevantes : à l’échelle mondiale, la mixité dans les parlements n’a progressé que de 0,5 points entre 2014 et 2015. Cette stagnation était déjà constatée dans le rapport de l’année dernière. 22,6%, serait-ce la proportion maximum de femmes que l’on peut atteindre ?

Tandis que l’Union interparlementaire insiste sur les efforts que les partis doivent fournir dans les démocraties où des dispositifs de parité existent pour laisser l’opportunité à des femmes de prendre des circonscriptions « gagnables », le Secrétaire Général de l’ONU, Ban Ki-moon saisissait l’occasion de la 60ème session des Nations Unies sur la condition des femmes pour lancer un appel à tous les Etats membres qui ont un Parlement et/ou un gouvernement 100% masculin : il faut que ça cesse !

Quelques jours plus tôt, celui qui a fait de l’égalité un axe prioritaire de son mandat avait aussi exhorté les armées engagées dans des coalitions onusiennes à intégrer davantage de femmes dans leurs rangs. Cela, pour se mettre en conformité avec la résolution 1325 de l’an 2000 qui prévoit une plus grande « contribution des femmes dans les opérations des Nations Unies sur le terrain », mais également pour prévenir le risque de violences sexuelles contre les femmes dans l’armée.

La charte du mois : pour plus de mixité à la City 

Directrice Executive de Virgin Money, Jayne-Anne Gadhia a fait paraître sur le site de l’entreprise les résultats d’une étude remise au Premier ministre portant sur la place des femmes dans la finance britannique. Attention douche froide : 23% seulement de femmes cadres, 19% de cadres supérieures et 14% de membres des ComEx dans un secteur qui compte 60% de femmes dans ses effectifs ; des écarts salariaux atteignant 40% entre banquiers et banquières (dans un pays où la moyenne des inégalités salariales tous secteurs confondus s’établit au niveau déjà élevé de 24%). Conclusion, il est temps d’agir et l’argent étant le nerf du changement, il est fondamental, selon Gadhia, que le secteur financier montre la voie, au lieu de s’enfermer dans sa situation critique.

Pour cela une idée simple : corréler le niveau des bonus des dirigeant.es des entreprises du secteur à leurs résultats en matière de mixité. Une charte a été signée le 22 mars… Mais dans une version a minima, loin des principes d’obligation (de fixer des objectifs chiffrés, de publier un rapport annuel sur la diversité de genre et de nommer un.e représentant.e de l’égalité et de l’inclusion au niveau exécutif) que Gadhia appelait de ses vœux dans un premier draft : finalement, le texte aura valeur indicative, sans contraintes ni sanctions.

L’homme engagé du mois : Marck Zuckerberg lance #LeanInTogether avec Sheryl Sandberg et la NBA

« La réunion la plus importante de la journée » : ainsi Zuckerberg a-t-il légendé une photo qui le montre radieux, donnant un biberon à son bébé sur sa page Facebook !

« Liké » plus d’1,3 million de fois et partagé par plus de 18000 utilisateurs et utilisatrices du réseau social qu’il a créé, le post témoigne une nouvelle fois de la détermination de Mark Zuckerberg à porter le sujet de l’égalité parentale sur la scène médiatique, économique et politique.

Certain.es auront peut-être remarqué le petit hashtag accompagnant le texte : #LeanInTogether. C’est le nom de la nouvelle campagne lancée le même jour par Sheryl Sandberg, en partenariat avec la NBA, pour engager les hommes dans le mouvement en faveur du partage des responsabilités.

Après HeForShe à l’échelle mondiale, Male Champions of Change en Australie, Happy Men ou #JamaisSansElles en France et d’autres initiatives un peu partout sur la planète, on ne peut que reconnaître qu’une dynamique d’engagement des hommes est bien à l’œuvre.

Le détail (qui peut tout changer) du mois : et si la formule « droits humains » remplaçait celle de « droits de l’homme »?

Le masculin fait office de neutre, dans la langue française, aiment à répéter les pourfendeurs de la féminisation des noms de métiers et de fonction. Sauf que c’est linguistiquement une erreur, comme nous l’avait expliqué Bernard Cerquiglini lorsque nous l’avions interviewé. Et quand même ce serait grammaticalement correct, force est de constater que dans les mentalités, la confusion entre un masculin qui serait masculin et un masculin qui serait neutre n’est pas pour aider les femmes à se projeter dans l’universalité.

Sur ce terrain du langage, avec tout ce qu’il charrie d’impact symbolique, un vieux débat franco-français pourrait bientôt trouver sa conclusion : celui qui pose la question de la reformulation de « droits de l’homme » en « droits humains », conformément d’ailleurs à l’usage dans de nombreux pays francophones et à la traduction qui est faite dans de nombreuses langues à commencer par la plus internationale, l’anglais (« human rights »).

Le 23 mars, lors du débat sur la proposition de lois sur l’éthique des sociétés donneuses d’ordre et/ou faisant appel à des fournisseurs qui devrait notamment leur imposer de veiller au respect des « droits de l’homme », la députée Catherine Coutelle a fait adopter un amendement imposant réécriture de l’article avec la notion de « droits humains ».

Ca n’a pris que quelques instants, ça n’a rien coûté et ça peut faire une vraie différence dans une patrie qui oublie souvent que si elle est la mère de ces droits fondamentaux issus de la Révolution française, ceux-ci n’ont été pleinement accordés aux femmes qu’après la Seconde guerre mondiale.

Le carton rouge du mois : les hommes du tennis pris en flagrant délit de sexisme décomplexé

Let ! La balle méchamment sexiste envoyée par Raymond Moore, patron du tournoi de l’Indian Wells, et récupérée au vol par Novac Djokovic a finalement atterri dans les filets.

On refait le match : le 20 mars, Moore déclare que « dans une prochaine vie, il veux être membre de WTA, parce qu’elle ne fait que profiter du succès des hommes ». Et d’ajouter que s’il était une joueuse, il « se mettrait à genoux chaque soir pour remercier Dieu d’avoir donné naissance à Federer et Nadal » sans qui le tennis ne serait rien et les tennis women encore moins !

Un séisme sur les cours, des réactions bien senties de Serena Williams ou Victoria Azarenka et une déferlante de condamnations sur les réseaux sociaux plus tard, le boss de l’Indian Wells présentait sa démission. Entre temps, le numéro 1 mondial Novak Djokovic avait pris sa défense, expliquant que le tennis féminin, attirant moins d’audience, pourrait très logiquement être moins bien rétribué. Et d’ajouter une énigmatique allusion aux « hormones »  qui compteraient parmi les obstacles que les femmes ont à surmonter pour accéder à une performance sportive digne de ce nom.

Fin du set le 23 mars quand le joueur a finalement présenter des excuses publiques sur son compte Facebook, expliquant que « l’adrénaline » de sa victoire du week-end avait pu altérer son jugement. Finalement, l’hormono-dépendance pourrait bien être partagé à égalité entre joueurs et joueuses.

La confusion du mois : non, le travail des femmes ne nuit pas au plein emploi !

Prenez un manuel scolaire d’économie des années 1980 à la page consacrée au chômage : où l’on vous explique que contrairement à certaines idées reçues, les femmes ne volent pas le travail des hommes et qu’il faut chercher ailleurs les causes du fléau.

Apparemment, le rédacteur d’un grand quotidien français s’était assoupi le jour de ce cours car il aura commis en cette année 2016, un article à charge contre les politiques familiales en général et les dispositifs de garde d’enfants en particulier qui seraient la cause même du différentiel de taux de chômage en France et en Allemagne (là où le taux de l’emploi féminin est très faible).

L’article résulte d’une lecture par trop rapide ou bien franchement biaisée d’une note de France Stratégie qui démontre précisément l’inverse : intitulé « Le temps partiel, une réserve d’emplois ? », le rapport souligne que le taux d’activité à temps plein des femmes, plus élevée en France que dans d’autres pays européens, vient relativiser nos chiffres globaux du chômage.

En d’autres termes, la massification du travail à temps plein des femmes fait que nous avons globalement plus de personnes dans l’emploi que les nations qui ont fait le choix d’une vision plus malthusianiste de leur marché du travail associée à un sacrifice de l’intégration économique des femmes. D’inspiration keynésienne matinée de sociale démocratie et tombant à point nommé dans le contexte d’une réforme sur le code du travail, le document de France Stratégie postule que le temps partiel, majoritairement « subi » par les femmes, constitue une réserve d’emploi qui serait utile à la création de richesse et à la relance du pouvoir d’achat.

 

 

Actualités sélectionnées et commentées par Marie Donzel, pour le blog EVE.